Aujourd’hui, j’ai eu envie de vous parler de Stanislas Dehaene. Pour tout vous dire, l’idée de cet article est apparue alors que la crise sanitaire bousculait notre quotidien. En cette période troublée, il était impossible de ne pas penser à tous les soignants qui s’attellent à sauver des vies. En songeant aux chercheurs qui travaillent sans relâche pour endiguer la pandémie, j’ai eu envie de vous parler d’un neuroscientifique reconnu et professeur au Collège de France qui a marqué mon parcours : Stanislas Dehaene. Il est un des grands spécialistes de l’apprentissage de la lecture et a fortement influencé, sans le savoir, la création de la méthode Apili.
Son nom ne vous dit peut-être rien. Pourtant, M. Dehaene est un des plus éminents neuroscientifiques français, psychologue cognitiviste et professeur au Collège de France.
Après avoir occupé pendant près de dix ans la fonction de directeur de recherche à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), il occupe depuis septembre 2015 le poste de professeur au Collège de France à la chaire de psychologie cognitive expérimentale et dirige l’unité de neuro-imagerie cognitive au centre NeuroSpin à Orsay.
Le site de l’Inserm partage une biographie édifiante sur l’immense travail accompli par Stanislas Dehaene. Si vous êtes curieux, n’hésitez pas à la découvrir.
En 2018, il est nommé par Jean-Michel Blanquer à la tête du Conseil scientifique pour l’éducation nationale. Quelle bonne décision !
Pourquoi vous demandez-vous ? Monsieur Stanislas Dehaene est un des plus grands spécialistes des neurosciences cognitives.
Il a étudié pendant des années les mécanismes du langage, des mathématiques et de la lecture. Ses recherches visent à élucider les bases cérébrales de ces opérations fondamentales du cerveau humain. Ses travaux ont été récompensés par plusieurs prix et subventions. Stanislas Dehaene a même obtenu le titre de Chevalier de la Légion d’honneur en 2011.
De plus, il a toujours été attaché à la transmission des résultats de ses recherches aux enseignants, aux parents et aux professionnels. Pour cette raison, il a publié de nombreux livres à destination du grand public comme La bosse des maths ou Les neurones de la lecture dont je vous parlerai par la suite.
C’est sans doute une des raisons pour lesquelles il est si agréable de l’écouter. Il parle toujours de manière claire et accessible à tous.
Si vous souhaitez découvrir des entretiens de Stanislas Dehaene, vous trouverez un grand nombre de ressources sur le site de Radio France.
Quel lien entre Stanislas Dehaene et la méthode de lecture Apili ?
La zone cérébrale active pendant la lecture
Lorsque j’ai développé la méthode Apili en 2014, il m’a paru essentiel de m’appuyer sur des études solides pour déterminer le type de méthode et la progression idéale. J’avais vu tellement de méthodes aux fondements plus que douteux.
Je me suis alors plongé dans les ouvrages de Stanislas Dehaene, dont le célèbre livre mentionné précédemment, Les neurones de la lecture.
Dans cet ouvrage, il commence par relater l’apparition de l’écriture chez les humains, il y a environ 5 400 ans. Il explique que le cerveau humain n’était pas destiné à cet apprentissage et que des neurones se sont spécialisés, au fil des siècles, à cette tâche complexe.
Stanislas Dehaene poursuit en décrivant avec précision les mécanismes cérébraux impliqués dans la lecture. Ce fut pour moi une découverte lorsque j’ai compris que l’aire cérébrale de la lecture était la même pour tout être humain, quelle que soit sa langue ou sa culture.
Cette zone si particulière porte le nom de cortex occipito-temporal ventral gauche. Elle se situe dans l’hémisphère gauche du cerveau, entre la zone de la reconnaissance des visages et la zone de la reconnaissance des objets.
Vous devez vous demander pourquoi je vous parle de tout ça… Vous allez vite comprendre. Je continue !
Dans le cadre de ses études, M. Dehaene a fait venir dans son laboratoire des enfants de CP (première primaire) qui apprennent à lire. Il a alors utilisé l’IRM fonctionnelle (imagerie par résonance magnétique) pour voir en direct ce qui se passait dans le cerveau de ces enfants.
Stanislas Dehaene a comparé deux groupes d’enfants. Le premier apprenait à lire avec une méthode syllabique, le second avec une méthode globale. Ce dernier apprentissage consiste à mémoriser des mots et des phrases par cœur dès le début du CP sans passer par le code.
Ses observations furent les suivantes :
- les enfants qui apprennent à lire avec une méthode syllabique stimulent la zone du langage citée plus haut (occipito-temporale gauche, siège de la lecture chez tous les humains) ;
- les enfants qui utilisent une méthode purement globale stimulent le côté droit du cerveau.
Stanislas Dehaene conclut en disant que les adultes qui ont appris à lire avec une méthode globale sont de moins bons lecteurs que ceux ayant appris avec une méthode syllabique. CQFD.
La méthode de lecture choisie pour Apili
Depuis, les méthodes purement globales ont été abandonnées, fort heureusement !
À ce jour, les méthodes de lecture les plus courantes sont des méthodes mixtes, alliant un apprentissage du code (déchiffrage des syllabes) et reconnaissance globale de mots outils.
Le débat entre les différentes méthodes de lecture est houleux, je ne veux en rien y entrer. Je souhaite simplement expliquer ce qui m’a amené à choisir le type de méthode pour Apili.
J’ai donc décidé, sans aucune hésitation, que ma méthode serait syllabique et qu’il n’y aurait aucun mot à retenir par cœur visuellement, en particulier en tout début d’apprentissage.
Je suis convaincu qu’il faut travailler le code (la correspondance lettre/son) en première intention.
De même que de nombreux collègues orthophonistes, je fais partie de ceux qui pensent que la reconnaissance globale des mots se met en place implicitement chez les enfants. Nous l’observons tous les jours en rééducation. Je suis sûr que les enseignants font le même constat.
L’enfant, lorsqu’il est amené à lire plusieurs fois le même mot passe du déchiffrage pur à la reconnaissance globale du mot et ce, de manière implicite.
Ces dernières années, j’ai souvent rêvé du jour où je pourrais envoyer mon livre à Stanislas Dehaene, ce grand spécialiste de la lecture. Ce jour est arrivé. Je lui ai écrit une longue lettre que j’ai soigneusement glissée avec ma méthode Apili. Je ne sais pas s’il recevra mon colis, mais je l’espère ! Si quelqu’un parmi vous le connaît ou sait comment le contacter, merci de lui en toucher un mot 🙂.
Vous souhaitez découvrir un autre visage important dans le développement de la méthode Apili ? Je vous invite à rencontrer Rémy Tornior, un illustrateur de grand talent !
Crédits photo : Babelio.
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