La consultation d’un orthophoniste est une étape importante pour accompagner un enfant qui présente des difficultés. Cependant, de nombreux parents ne savent pas à quoi s’attendre lorsqu’ils prennent rendez-vous pour un bilan orthophonique. À quoi sert cette évaluation et comment se déroule-t-elle ? Nous abordons le sujet dans cet article.
Qu’est-ce qu’un bilan orthophonique ?
Le bilan orthophonique constitue un outil clinique de diagnostic qui va notamment permettre de constater une dyslexie, une dysgraphie, une dysphasie ou une dysorthographie. Cette évaluation est également un complément dans l’investigation de certains cas de TDAH, d’autisme et autres troubles de l’apprentissage.
Pour le réaliser, il est nécessaire de passer par une prescription médicale, généralement par votre médecin généraliste. Néanmoins un autre médecin peut se charger de cette prescription comme un pédiatre, un neuropédiatre, un pédopsychiatre ou un médecin ORL.
Les premiers signes indiquant la nécessité de suivre un bilan orthophonique peuvent être des problèmes d’articulation, de prononciation des mots, de construction des phrases ou des difficultés pour apprendre à lire ou à écrire. Ces difficultés peuvent être observées par la famille, mais aussi par l’enseignant·e de votre enfant qui peut suggérer de consulter un orthophoniste pour réaliser un bilan.
Chaque bilan orthophonique correspond à des objectifs, des outils et une cotation spécifique en fonction de l’ordonnance du médecin prescripteur, il peut porter sur :
- la communication et le langage oral et/ou bilan d’aptitudes à l’acquisition de la communication et du langage écrit ;
- communication et langage écrit ;
- la dyscalculie et troubles du raisonnement logico-mathématique ;
- la déglutition et les fonctions oro-myo-faciales ;
- le bégaiement et autres troubles de la fluence ;
- la phonation ;
- les troubles d’origine neurologique ;
- la communication et le langage dans le cadre des handicaps moteurs, sensoriels ou mentaux (surdité, paralysies cérébrales, troubles envahissants du développement, maladies génétiques).
Il existe deux types de bilans orthophoniques, celui d’investigation et celui avec rééducation si nécessaire.
Le bilan orthophonique d’investigation
Le bilan orthophonique d’investigation sert à confirmer ou infirmer la présence d’un trouble de l’apprentissage. À la fin de cette évaluation, l’orthophoniste adressera au prescripteur du rendez-vous un compte rendu de son examen.
Le médecin détermine alors s’il est nécessaire de prescrire une rééducation en conformité avec la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). Dans ce cas-là, l’orthophoniste établit une demande d’accord préalable (DAP) sur la base de cette prescription.
En d’autres termes, l’orthophoniste n’entame pas une rééducation à la suite du bilan, il doit d’abord attendre le retour du médecin prescripteur. Il s’agit avant tout, comme le nom l’indique, d’une « investigation ».
Le bilan orthophonique avec rééducation si nécessaire
Durant le bilan orthophonique avec rééducation si nécessaire, l’orthophoniste pose le diagnostic et détermine les objectifs, le nombre et la nature des séances de rééducation.
Ainsi, l’orthophoniste n’aura pas besoin d’attendre la validation du médecin prescripteur pour commencer la rééducation du patient.
La plupart du temps, le bilan orthophonique présente une prescription avec rééducation si nécessaire.
Dans quels cas le bilan orthophonique est-il prescrit ?
Lorsque le développement du langage se déroule bien, les enfants prononcent leurs premiers mots vers l’âge d’un an.
L’édition Réalités Pédiatriques #188 Revues Générales Orthophonie recommande ainsi de prescrire un bilan orthophonique dès lors qu’une anomalie ou un doute sur le développement de l’enfant est constaté dans les domaines de :
- la communication ;
- le langage oral, en compréhension ou en expression ;
- l’articulation ;
- la parole ;
- la déglutition ;
- les troubles vocaux ;
- l’apprentissage de la lecture, de l’orthographe (phonétique, lexicale et syntaxique), de l’écriture et du calcul.
Crédit photo : réalités pédiatriques # 188 Octobre 2014 Cahier 1
Benjamin Stevens, orthophoniste et créateur de la méthode Apili conseille de prendre rendez-vous si votre enfant :
- ne parle pas ou très peu à l’âge de 2 ans ;
- ne comprend pas ce que vous lui dites ;
- n’est pas compris par votre entourage ;
- bégaie ;
- ressent de l’énervement ou de la frustration lorsqu’il souhaite parler ;
- subit des moqueries de la part de ses camarades de classe.
Crédit photo : Guide pratique Les troubles de l’évolution du langage chez l’enfant, Société Française de Pédiatrie avec le soutien de la Direction Générale de la Santé, mars 2007.
Si vous avez un doute sur le besoin de réaliser ou non un bilan orthophonique, n’hésitez pas à demander conseil aux enseignants de votre enfant ou à votre médecin généraliste.
Comment se déroule un bilan orthophonique ?
Avant d’entamer le bilan
La première demande qu’adresse Benjamin Stevens aux parents qui viennent le consulter pour un bilan orthophonique du langage oral concerne l’audition : est-ce que votre enfant entend correctement ? Est-il sujet aux otites et si c’est le cas, à quelle fréquence ? S’enrhume-t-il facilement ? Est-ce que son audition a été vérifiée lors de la visite médicale à l’école ?
S’il y a le moindre doute à ce sujet, Benjamin Stevens conseille toujours aux parents de prendre rendez-vous avec un médecin ORL, spécialiste du nez, de la gorge et des oreilles. En France, cette consultation ne nécessite pas une prescription médicale et fait l’objet d’une prise en charge par la Sécurité sociale. En Belgique, une part du prix de la consultation reste à la charge des parents.
Vous pouvez retrouver d’autres conseils pour aider votre enfant à bien parler dans notre article sur le sujet.
De la même manière, avant d’entamer un bilan orthophonique du langage écrit, il est nécessaire de tester la vue de votre enfant : a-t-il souvent mal à la tête ? Se plaint-il de douleurs ophtalmiques ? Si c’est le cas, il est important de demander l’avis d’un ophtalmologiste ou d’un orthoptiste.
L’anamnèse
Le bilan orthophonique commence par un entretien avec l’orthophoniste, votre enfant et vous. Cette étape permet au spécialiste de comprendre l’histoire de son jeune patient, son mode de vie, les problèmes qu’il rencontre et ses antécédents médicaux.
Vous pouvez mentionner tout ce qui vous inquiète ou les symptômes que vous avez constatés. Lors de cette première entrevue, pensez à apporter le carnet de santé de votre enfant pour que l’orthophoniste puisse y jeter un œil.
Les tests
Au cours de cette seconde étape, l’orthophoniste réalise une série de tests normés. Ces épreuves étalonnées dépendent des symptômes et de l’âge des patients.
En règle générale, les tests se réalisent sans la présence des parents qui patientent en salle d’attente. Néanmoins, ils peuvent être présents si l’enfant n’est pas capable de comprendre les consignes.
Oups, on dirait bien que « dessiner sur les murs » n’était pas un test prévu au programme…
Langage oral
Dans le domaine du langage oral, les tests permettent d’évaluer plusieurs compétences :
- métaphonologie : identification des syllabes, décomposition des mots et manipulation des sons ;
- phonologie : conscience des sons qui composent notre langue ;
- syntaxe : description d’une situation donnée pour évaluer l’organisation des mots dans les phrases ;
- lexique : analyse du vocabulaire compris et employé. On distingue alors le lexique actif qui recense le vocabulaire utilisé en expression et le lexique passif qui comprend le stock de mots compris par le patient ;
- praxies bucco-faciales : tests autour de la coordination des gestes et des habiletés motrices comme le fait de tirer la langue, gonfler les joues, mettre la bouche en avant, froncer les sourcils, de faire des petits yeux ou de les fermer complètement, etc. ;
- articulation : imitation et répétition des différents sons et mots.
Langage écrit
Les tests concernant le langage écrit portent à la fois sur la lecture et l’écriture.
Pour la lecture, les épreuves comportent de la lecture de syllabes, de mots (réguliers et irréguliers), de logatomes (mots qui n’existent pas), de phrases et de textes. Ainsi sont testées les capacités de déchiffrage et de compréhension de l’enfant.
Pour l’écriture, l’orthophoniste va étudier la capacité du patient à écrire sous la dictée des mots réguliers, irréguliers, des syllabes et des logatomes, ainsi que sa faculté à appliquer les règles de grammaire, de syntaxe et de conjugaison.
Ne vous inquiétez pas, votre enfant n’a pas besoin d’exceller en latin, l’orthophoniste n’attend pas une maîtrise parfaite de la langue de Molière ! Les résultats obtenus seront analysés par rapport à une moyenne dans le but de constater s’il y a un trouble d’apprentissage sous-jacent ou non.
Habiletés cognitives
Les habiletés cognitives correspondent aux capacités du cerveau qui permettent les interactions avec l’environnement. Elles comprennent par exemple l’assimilation des informations, l’interaction avec les individus, le raisonnement, la perception ou la concentration.
Ainsi, les exercices dans ce domaine se diviseront généralement ainsi :
- mémoire : restitution de mots ou de suite de chiffres, reconnaissance d’images vues et mémorisées ;
- traitement visuoattentionnel : copie d’une figure complexe, identification de lettres ou comparaison de symboles. Ces tests permettent aussi de vérifier les capacités attentionnelles de l’enfant ;
- notions temporelles et spatiales. (jours de la semaine, mois de l’année…)
Cette présentation des tests reste bien sûr généraliste. Pour découvrir une des épreuves réalisées lors d’une consultation, Benjamin Stevens vous présente la « figure de Rey » dans cet article pour comprendre la dyslexie.
Combien coûte un bilan orthophonique ?
En France, environ 60 % d’une séance d’orthophonie est prise en charge par la Sécurité sociale, le reste est remboursé par votre mutuelle. Généralement, il reste une participation de 0,50 centimes à la charge des parents.
En Belgique, le remboursement d’une consultation de logopédie est moins bien remboursé, les parents devront alors prendre une plus grande partie du coût à leur charge.
Puisque le bilan orthophonique est remboursé,
Lulu va en profiter pour s’acheter une bonne glace !
Que se passe-t-il à la fin du bilan orthophonique ?
Le bilan orthophonique est un outil indispensable à la pose du diagnostic orthophonique, à la décision thérapeutique et à la conduite du traitement. Ainsi, il inclut :
- l’objet du bilan ;
- l’anamnèse ;
- les domaines explorés, les tests ou épreuves utilisés, ainsi que les résultats ;
- le diagnostic ;
- le projet thérapeutique avec l’objectif de la rééducation, le nombre de séances ainsi que leur fréquence et les examens complémentaires proposés.
Crédit photo : exemple de structure pour un bilan orthophonique extrait du guide pratique Les troubles de l’évolution du langage chez l’enfant, Société Française de Pédiatrie avec le soutien de la Direction Générale de la Santé, mars 2007.
Une fois le diagnostic orthophonique posé, l’orthophoniste va transmettre les résultats au médecin prescripteur. Il indiquera si une prise en charge est nécessaire et, si c’est le cas, le type de prise en charge, ses objectifs, sa fréquence et sa durée.
Allez, courage, nous sommes tous avec toi pour
trouver un rendez-vous chez un orthophoniste !
Où prendre rendez-vous pour un bilan orthophonique ?
En France, la prise de rendez-vous chez un orthophoniste peut prendre des allures de parcours du combattant ! Le manque de professionnels entraîne des listes d’attentes à rallonge et des difficultés de prise en charge. Cette situation est particulièrement frustrante pour les parents.
Pour vous aider dans votre recherche, voici quelques astuces pour obtenir un rendez-vous :
- contactez tous les orthophonistes de votre ville et rappelez régulièrement ;
- inscrivez-vous sur les listes d’attentes en mentionnant vos coordonnées complètes ;
- en raison des départs en vacances, essayez de rappeler avant les vacances scolaires au cas où un rendez-vous de dernière minute se libérerait ;
- précisez dans votre message si la consultation concerne un bégaiement, les orthophonistes traitent ce trouble en priorité. De la même manière, vous pouvez indiquer si votre enfant ne parle pas du tout à 3 ans, la consultation se fera de manière urgente ou vous serez contacté pour recevoir des premiers conseils avant votre rendez-vous.
Pour trouver un orthophoniste près de chez vous, vous pouvez réaliser une recherche sur les Pages jaunes. Ce site recense également une liste de logopèdes belges. Pour les personnes résidant en Suisse, vous rencontrerez des informations utiles sur le site de l’association romande des logopédistes. Enfin, cet annuaire de l’ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec servira de référence aux habitants du Québec au Canada.
Benjamin Stevens a développé la méthode de lecture Apili spécifiquement pour les enfants présentant des troubles d’apprentissage. Après avoir rencontré de nombreux jeunes patients démotivés, perdus ou réfractaires à la lecture dans ses consultations, il a souhaité créer un support qui changerait leur perspective et transformerait cette activité en vrai moment de plaisir ! Vous pouvez découvrir les histoires drôles de la méthode dans la boutique d’Apili et plusieurs retours d’expériences sur notre page consacrée aux parents ou sur notre compte Facebook.
Sources :
- Guide pratique Les troubles de l’évolution du langage chez l’enfant, Société Française de Pédiatrie avec le soutien de la Direction Générale de la Santé, mars 2007 ;
- A. Daurat 1, 2, A. Santos, H. LIigeard-Cassigneul, A. Alba, T.-N. Willig, Réalités pédiatriques # 188 Octobre 2014 Cahier 1.
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